C'était un peu son "petit chouchou". Oswald parlait d'expérience. Tous les médecins avaient leur préféré. Et lui, c'était Morgan Montgomery. Pourquoi ? Le pourquoi n'était pas important. C'était une somme de choses, de qualités, de défauts. Le jeune homme n'agissait pas comme un dément psychotique, ne hurlait pas, ne tempêtait pas. Il restait là, à fixer l'extérieur depuis le porche. Son dossier médical indiquait énormément de choses. Claustrophobie, paranoïa - une pathologie plus que familière, définitivement - et surtout dépression, tendances suicidaires. Comment vouliez-vous traiter un gamin qui avait été séquestré entre quatre murs ? Pour Oswald, c'était un non sens même. Il pouvait le voir dans les yeux du jeune homme : le besoin d'évasion, d'air libre. Le besoin de ne plus être enfermé. Il le comprenait. Il avait toujours voulu le mieux pour ses patients, quitte à sortir des sentiers battus. Il était déjà hypnothérapeute, et c'était déjà bien assez regardé de travers par ses confrères. Il pouvait bien en rajouter un peu, non ? Le psychiatre sourit et quitta son poste d'observation - la fenêtre de son bureau, d'où il avait longuement observé Morgan. Il savait pourquoi le garçon rentrait, ils avaient rendez-vous dans cinq minutes.
Lorsque Morgan entra ce jour-là, Oswald lui fit son habituel sourire chaleureux et annonça tranquillement. "Monsieur Montgomery. Ponctuel, comme toujours. Je ne vous propose pas de vous asseoir aujourd'hui mais plutôt de me suivre. Et pas de questions, je vous prie." Les yeux bleus du psychiatre pétillaient alors qu'il déposait sa blouse sur le dossier de sa chaise de bureau, invitant le garçon à sortir du bureau, verrouillant derrière lui. Il traversa l'aile nord et rejoignit le parking des employés sous la chaleur écrasante. "Nous allons prendre ma voiture. Pas longtemps, nous n'allons pas très loin, ne vous inquiétez pas." Il le rassura d'un autre sourire chaleureux. Il lui expliquait tout ça pour ne pas que le jeune homme panique. Etre emmené si soudainement pouvait facilement éveiller un traumatisme si l'on ne prenait pas garde. Prenant place au volant de sa BM grise, Oswald mit la radio pour détendre un peu Morgan. "Ca ne sera pas long, vous verrez. Aujourd'hui, nous essayons avec vous quelque chose d'un peu différent."
Se faufilant dans la circulation, le psychiatre s'arrêta bientôt, après une dizaine de minutes en voiture sur un parking près des grilles du Central Park. Faisant signe au jeune homme de le suivre, il pénétra dans le grand parc, relevant les manches de sa chemise bleu clair - il faisait vraiment chaud. Il s'arrêta peu après l'entrée, laissant le temps à Morgan de se familiariser avec l'air agréable, l'ombre paisible de hauts arbres. "Alors ? Le nouveau cabinet d'aujourd'hui vous plait ?" Fit Oswald avec un peu d'humour, ses yeux pétillants de plus belle au dessus de son large sourire - il était assez fier de sa petite idée. Et tant pis pour ceux qui ne trouveraient pas ça très conventionnel. Il emmerdait les traditionalistes.
Sujet: Re: Des méthodes non conventionnelles Mar 3 Sep - 23:39
Let me go out there, so I can breathe fresh air
Je prends l'air avant d'aller m'enfermer dans le bureau du Docteur Prince. Je profite de nouveau que le patio soit désert pour être complètement tranquille. Je regarde l'heure sur ma montre, ma séance va commencer dans cinq minutes. Je soupire un peu. Je sais pas si j'appréhende ou si j'ai hâte, ces séances avec le psy me font du bien, mais c'est toujours assez dur pendant l'heure qu'on passe ensemble. J'ai peur c'est clair, j'aime pas parler de ce qui m'est arrivé. J'aime pas avouer que je suis différent. J'aime pas savoir qu'il faut que je fasse un gros travail sur moi-même pour avancer, pour aller mieux. Je déteste tout ça. Toute cette clinique. Je déteste cet enfoiré qui m'a séquestré chez lui.
Je suis dans mes pensées alors que je passe les couloirs, les escaliers, pour me rendre au bureau du doc. Je frappe à la porte avant de l'ouvrir. Je regarde le doc et il me dit de le suivre. Je le vois enlever sa blouse. Je suis très intrigué. Il me dit de pas poser de questions. J'en ai quelques unes qui me viennent à l'esprit mais elles n'osent pas franchir à la barrière de mes lèvres. Je reste silencieux et je le suis. On va jusqu'au parking, il me dit de pas m'inquiéter. Ok. Je commence à sentir mon coeur battre plus vite. Est-ce qu'il serait pas en train de m'enlever ? Non... Impossible. Il bosse dans cette clinique, il est réputé, tout le monde s'en rendrait compte rapidement. Nos rendez-vous sont fixés toutes les semaines sur un planning connu de tout le personnel médical. J'essaie de me raisonner pour ne pas partir dans un épisode paranoïaque. Après tout, quitter le cadre de la clinique pour quelques temps ça ne pourra me faire que du bien.
J'hoche la tête après avoir pesé le pour et le contre assez longtemps et j'entre dans sa voiture. Je reste silencieux, je regarde la route, ça me fait bizarre d'être de nouveau dans le monde « normal ». Ca fait plus d'un mois que je suis enfermé dans cette clinique. Ca fait du bien de voir un autre paysage. On arrive au parc le plus grand des environs. Je sens mon coeur battre plus vite encore. De l'espace. De la nature. De l'air. Je me sens bien et je ne suis pas encore sorti de la voiture, je connais l'endroit. Le doc me fait signe de le suivre, je sors de la voiture. On entre dans le parc. Je me mords la lèvre. Je regarde tout autour de moi. Je me sens bien. J'ai même envie d'étendre les bras pour prendre possession de tout cet espace. Je ferme juste les yeux, remplissant mes poumons de cet air frais. Je souris doucement quand je l'entends me demander comment je trouve le cabinet pour la séance d'aujourd'hui.
« Si on pouvait venir ici à chaque fois ce serait juste parfait. »
Ma voix est un peu cassée, déjà que j'ai naturellement la voix grave, je n'ai pas parlé depuis un moment, ça n'aide en rien. Je réouvre les yeux et je regarde le doc.
« Merci... »
Je ne sais pas quoi dire d'autre sur le moment. J'ai vraiment l'impression qu'il me comprend.
« C'est exactement ce dont j'avais besoin. »
Ce genre de choses me donne vraiment de l'espoir. Cette clinique peut vraiment être la clé de mon rétablissement. Ma nouvelle vie commence ici. Je suis presque sûr qu'avec ce psy je peux retrouver ma paix intérieure. J'ai toujours mon sourire aux lèvres, un petit sourire, mais un sourire quand même. Longtemps que ça ne m'était pas arrivé.
Il n'était pas difficile de deviner les besoins de certains patients. Une touche d'observation, une goutte de subtilité. Les choses étaient évidentes pour qui prenait la peine de s'attarder dessus. Dans le cas de Morgan, il ne fallait pas être médium pour deviner son besoin d'évasion. Non seulement il avait été séquestré - ce qui constituait une bonne raison de ne pas aimer être cloîtré - mais en plus il était nouveau dans la clinique. Le temps d'adaptation était le plus difficile. Lui-même n'aurait pas aimé se dire qu'il ne pourrait pas être libre de ses mouvements - cela lui rappelait trop ses dix ans en internat.
Le vaste parc était visiblement une bonne idée, songea-t-il en voyant le visage du garçon se métamorphoser. Les yeux écarquillés de surprise étaient suivis d'une expression plus heureuse qu'il ne l'avait vu sur ce visage. Sa réplique lui tira un petit sourire mais il n'y répondit rien. Il doutait de pouvoir à chaque séance l'emmener ici, même s'il allait essayer de le faire régulièrement. Ce jeune homme avait besoin de ça, c'est évident. Il n'y avait pas de risque réel à le faire sortir ainsi. Il était là pour l'encadrer et il n'était pas connu pour faire des vagues. Il n'aurait pas emmené une autre de ses patientes, Chloé, dans un parc, par exemple. Mais lui, si c'était ce dont il avait besoin, ça ne le dérangeait pas. Lui-même appréciait de se retrouver à l'air libre, par cette chaleur et ce beau ciel. Son remerciement était un beau cadeau, de même que son sourire. "De rien" Fit-il gentiment en répondant au sourire du jeune homme. Commençant à marcher sur le sentier goudronné familier - il faisait son jogging ici tous les dimanches - il le guida au travers des lieux agréables, rejoignant l'ombre des arbres pour échapper à la chaleur accablante.
"Trouvons un endroit agréable pour nous installer." Dit-il encore tout en observant les pelouses où quelques promeneurs vaquaient, de même que quelques familles et groupes d'adolescents. Il avisa un endroit ombragé, dans un coin un peu à l'écart et donc tranquille et s'y dirigea tranquillement, une main dans la poche de son pantalon anthracite. Finalement, il s'assit en tailleur dans l'herbe grasse sans plus de cérémonie, à l'ombre d'un grand eucalyptus populus. Sortant de sa poche un petit dyctaphone familier - il l'utilisait pour ses séances - il le mit en mrche, indiquant la date et le lieu avant de commencer. "C'est difficile de rester à la clinique, n'est-ce pas ? Cela ne fait qu'un mois mais c'est généralement le moins facile, le temps de s'habituer. Mais n'est-ce pas aussi un peu sécurisant pour vous d'être dans un endroit surveillé ?" Il s'appuya contre le tronc, surveillant les réactions de Morgan sans en avoir l'air, de derrière ses paupières mi-closes.
Sujet: Re: Des méthodes non conventionnelles Mer 4 Sep - 23:31
Let me go out there, so I can breathe fresh air
Ca me fait bizarre de me sentir aussi bien, je n'ai vraiment plus l'habitude. J'aimerais me sentir plus souvent comme ça. Faudrait que je vive en extérieur pour ça, après tout avec le climat qu'il y a en Australie je suis sûr que ce serait possible. Je suis quand même content au fond de moi de ne pas être devenu incontrôlable, grâce à ma bonne conduite, j'ai le droit d'aller autant que j'ai envie dans le Patio. C'est sûrement pour ça que je suis toujours presque seul là bas, ce n'est pas donné à tous de pouvoir y accéder. Tant mieux.
Je reste immobile à l'entrée du parc jusqu'à ce que le doc reprenne la marche, je le suis bien sûr, on est en séance de psy, je ne l'oublie pas. Je regarde autour de moi lorsqu'on évolue dans le parc. Je le laisse choisir le coin où nous nous installerons, je n'ai pas de préférence, du moment qu'on est pas en intérieur, entre quatre murs, tout me va. Il y a du monde autour de nous, ce parc est populaire, mais je ne leur prête aucune attention. Je reste dans ma petite bulle d'air. Je ne m'intéresse pas aux gens. D'ailleurs j'aimerais bien que personne ne me connaisse dans le lot, ça m'arrangerait. Il y a déjà bien trop de gens qui me reconnaissent à la clinique. On marche un peu puis il s'assoit dans l'herbe, je le suis presque aussitôt, ne me posant pas de question si c'est propre, pas propre, si c'est mouillé par terre, je m'en fou complètement. Je le vois qui sort son dictaphone, ça y est, les choses sérieuses vont commencer.
J'espère qu'on n'ira pas trop loin dans l'analyse, je n'ai pas envie de me mettre à chialer dans un lieu public. Il me pose plusieurs questions. Je prends le temps de répondre, je devrais peut être pas, être spontané ça devait révéler beaucoup sur les gens, à leur insu. Je n'ai pas envie d'être pris au dépourvu, je sais ce que je raconte. Enfin, la plupart du temps. Dès que j'entre dans une crise je commence à partir dans tous les sens et rare sont les gens qui arrivent à mettre du sens sur mes paroles. Je touche l'herbe avec mes mains, j'arrache quelques brins sans vraiment y penser, je me regarde faire en même temps...
« Ouais... C'est pas facile... Surtout quand on voit l'état des autres qui font bien flipper des fois. J'aime pas être enfermé à clé le soir dans ma chambre mais quand je sais qu'il y a certains internés qui sont accusés de meurtre... d'un coup ça me dérange moins. Mais j'aime pas ça quand même. C'est comme les barreaux aux fenêtres de ma chambre. Je supporte pas... »
J'arrache un peu plus sèchement les brins d'herbe après avoir évoqué les barreaux. Je les déteste ces putains de barreaux de merde. J'ai fait une crise horrible quand j'ai emménagé dans la chambre. Ils ont dû me filer des sédatifs pour me calmer. J'essaie de les oublier mais c'est dur, ils sont là. Du coup je passe le moins de temps possible dans ma chambre.
« Y'a pas des chambres sans barreaux ? »
Je sais qu'il y en a, mais elles ne se trouvent pas dans l'Aile Nord. Je sais très bien que je ne pourrais pas être déplacé de l'Aile Nord.