Grande brune dégingandée d'un mètre quatre-vingt, Chloe a tout du stéréotype de la butch, la lesbienne masculine: elle s'habille de manière décontractée sans faire attention à son apparence, se conduit comme une hommasse, fume comme un sapeur et boit de la bière. De garçon manqué à l'enfance puis à l'adolescence, elle est devenue simplement négligée à l'âge adulte, et son naturel est vulgaire et décomplexé: elle rote, elle crache, elle se tient mal et met les pieds sur les tables; elle laisse trainer ses affaires, sort un "fuck" à chaque phrase.

Ses occupations sont tout aussi masculines: elle regarde le foot et est fan de catch américain, adore les voitures et se nourrit presque exclusivement de pizzas ou de plats cuisinés à simplement passer au micro-onde. Quant aux détails de son style vestimentaire, il n'y a pas grand chose à noter: Chloe ne porte que du noir, principalement des jeans avec des t-shirts à l'effigie de ses groupes de Rock favoris, des effigies automobiles (l'aigle des Pontiac Thunderbird arrivant en tête) ou des slogans stupides. Et vous savez quoi? Elle conduit un 4x4; le summum du cliché.

Elle renifle, siffle les filles dans la rue et drague avec des phrases lourdingues. C'est une "stone butch"; une femme très masculine qui séduit les femmes et leur apporte du plaisir sans réciprocité. Avec cet armada de clichés, on pourrait se demander si Chloe a des qualités ou des passions autres que celles qui collent au beauf de base. La réponse est oui mais elle n'aime généralement pas en faire montre, assez secrète sur elle-même.

La jeune femme aime l'effort, le sport en général; elle-même fait du Taekwondo depuis ses sept ans, ses parents ayant pensé qu'un sport de combat l'aiderait à canaliser sa violence. La musique aussi, fan d'INXS, de Depeche Mode et d'Eurythmics mais aussi d'ACDC et d'autres groupes de Heavy Metal et de New Wave. Elle aime sortir mais sort souvent seule: Chloe a des difficultés sociales et a beaucoup de peine à se faire des amis; alors elle erre souvent seule le soir, passant de bar en bar.

La jeune femme est atteinte d'un trouble de la personnalité qui joue sur la variabilité de ses émotions qu'elle gère très mal. Le sentiment chronique de vide qu'elle a date du début de son adolescence et ne l'a jamais lâché; l'angoisse d'être abandonnée, sa détestation d'elle-même, ses colères intenses proches de la rage... tout cela pourrit la vie de son entourage mais aussi la sienne: ses parents ont depuis longtemps décidé de la laisser se débrouiller avec la gestion de ses pulsions, refusant de la ré-héberger après sa seconde fugue.

Ressentant confusément un sentiment de rejet de la part du monde entier, Chloe nage entre deux rives: l'instabilité affective et difficulté sociale. Elle n'aime pas qu'on la fixe trop longtemps, ni même qu'une fille la voit nue; elle couche toujours à moitié habillée. Et ses conduites à risque sont autant des provocations, des appels au secours et un moyen de décharger son angoisse: quand elle roule bien trop vite et n'importe comment, ça lui vide la tête, tout comme quand elle s'enivre.

Sa sexualité est brutale et chaotique, hantée d'un sentiment de vide et d'ennui malsain, chronique, tout comme ses insomnies. Le soir, seule, elle regarde le plafond et prie Dieu de l'aider à changer. La culpabilité est là; et pourtant chaque fois ses colères la reprennent. Alors si elle vous parait méchante et badass, la petite Chloe, elle est en réalité rongée par l'angoisse et tout le temps à se dévaloriser.

Pourtant elle refuse de montrer ses faiblesses, agissant comme un beauf pétri de préjugés, agressif, ennuyeux et vulgaire. Elle manipule, grossièrement: elle fait du chantage quand elle est jalouse, essayant de culpabiliser les autres; ça ne prend pas toujours. Rarement en fait. Mais ça marche plutôt bien avec les femmes.

Combien de fois s'est-elle abimé les phalanges aux murs et aux portes... la colère revient, même après ses traitements; cette peur d'être ignorée, d'être rejetée. La peur d'être toute seule: elle ne sait pas retenir les femmes qu'elle aime, les faisant irrémédiablement souffrir à la hauteur de ses sentiments; car lorsque Chloe aime, c'est avec cette rage qui est en elle: elle aime follement, entièrement: désespérément.

Et elle est agressive, soupçonneuse. Elle les a toutes aimé, de toute son âme: puis, elle vous dira que ce sont toutes des putes et des salopes, une fois la relation finie. Toutes des putes. Sa perception de l'autre est très changeante. Elle refuse de se remettre en question; surtout pas: Chloe douterait encore plus d'elle-même après. Alors elle les insulte et les menace, pour oublier qu'elle les a tant aimé, et les aime peut-être encore. Puis elle regrette, mais ne le dira jamais.

Et pourtant sous cette couche de vernis détestable se cache autre chose: Chloe a certes du mal à se faire des amis, mais une fois qu'elle en a un, elle est fidèle et loyale; la brune donnerait tout à ses amis, capable d'immenses sacrifices pour eux. Son affection, comme ses colères et son amour, n'accepte aucune médiocrité. Contre toute attente, et elle vous dira le contraire, elle adore les enfants et semble avoir une fibre particulière avec eux, cassant son image de stone butch insupportable. Elle donne également régulièrement son sang, et a une carte de donneur d'organes: elle a récemment cédé le lobe d'un de ses poumons et le referait sans hésiter s'il s'agit d'aider quelqu'un avec le don d'un rein ou d'un lobe du foie. Car oui, elle est en excellente santé physique; une santé de fer, malgré ses excès.

Elle prend soin de ceux qu'elle aime avec une maladresse parfois touchante, qui ne sait pas comment s'exprimer dans cet océan de colère; la tendresse est là, sous les pattes de l'ours. Sa passion pour le dessin reste dans le cadre privée, où elle gribouille pour son propre plaisir: elle aurait voulu devenir tatoueuse et aurait surement eut le talent de le faire; cependant le matériel est au dessus de ses moyens, très largement. Comme beaucoup d'autres choses.

Dossier Médical: Trouble de la personnalité borderline; Chloe a été admise dans la section psychiatrique de la clinique Waters après avoir avoir commis divers délits, principalement des coups et blessures sur son ex petite amie; elle n'arrive pas à canaliser ses émotions et ne parvient souvent qu'à les exprimer au travers de la colère et la violence. On lui a diagnostiqué un TPB, un trouble de la personnalité borderline, souffrant depuis l'adolescence d'une instabilité importante dans ses relations interpersonnelles, dans l'image qu'elle a d'elle-même ainsi que dans sa gestion de ses émotions. Chloe ressent les émotions plus sensiblement, plus profondément et plus longtemps que la normale. Sa pathologique repose dans son cas sur son angoisse et son insécurité interne constantes: elle affiche des attitudes de mise à l'épreuve de son entourage incessantes, le passage à l'acte comme décharge de l'angoisse, comme une forme de défense. Jadis mal traitée par son psychiatre, elle est devenue dépendante aux anxiolytiques et insomniaque mais tout cela semble s'être arrangé depuis son passage à la clinique. Pourtant les bouffées d'agressivité sont toujours là, sapant ses rapports avec autrui: Chloe reste une fille brutale, constamment sur la défensive et sur le point d'exploser, de replonger avec ses anciens démons.