Un frisson parcourut mon échine lorsqu’un coup de vent vint balayer le parc où je me trouvais, les arbres sans feuilles ne pouvant pas le bloquer. L’ambiance était froide, sans vie. Oui, nous étions bien au printemps, mais cela ne paraissait pas tellement. Cela en était presque déprimant. Cependant, tranquillement, mais sûrement, tout allait reprendre vie. Il fallait simplement laisser aller le cours des choses. Et ne pas perdre espoir. Ce genre d’ambiance n’était pas bon pour les patients de la clinique Waters. Les saisons rythmaient souvent leur comportement et je remarquais qu’ils étaient moins enclins à échanger lors de ces périodes. Ça me rendait triste pour eux.

Malheureusement pour moi qui aimais tant la chaleur, la soirée qui commençait était bien fraiche. Cela m’avait obligé à me vêtir d’un léger manteau par-dessus ma petite robe rouge. Au courant de la journée, j’avais passé un peu de temps avec ma sœur ainée; Anaëlle. J’avais déjeuné avec elle, mais elle avait eu du boulot, alors j’étais partie déambuler dans les corridors. J’avais ensuite aussi joué à des jeux de société avec des patients. Je faisais beaucoup de bénévolat parce que j’aimais bien voir le sourire sur le visage des gens.

Mais ce soir, je m’accordais un peu de temps seule avant de repartir à mon appartement. J’avais donc décidé de passer une heure ou deux dans le parc qui se situait en arrière de la clinique. Il était tout simplement magnifique et j’aimais beaucoup y passer du temps. Je marchais parfois dans les sentiers, sinon, je m’assoyais sur un des nombreux bancs et je lisais des livres.

Ce soir, c’était ce que j’allais faire. Je me rendis dans mon coin préféré et m’assied sur le banc. Regardant le ciel gris, je soupirai. J’étais cependant heureuse de me trouver là. J’aimais cet endroit, je ne savais pas trop pourquoi. Je ne savais pas non plus pour quelles raisons tant de gens détestaient ces lieux. C’était un lieu paisible qui était propice à la guérison de l’âme et du physique, pas un endroit où on torturait les gens, voyons! Pensait-il qu’il s’agissait d’un asile des années 1960?

Mystère. Je pris mon livre qui était dans mon sac à main et commençai à lire. Les minutes s’écoulèrent donc sans que j’en prenne conscience. La luminosité diminuait de plus en plus, mais j’avais développé cette capacité à rester concentrer tout de même. J’étais simplement bien, heureuse.

Un temps de merde, on pouvait dire qu'en ce moment le temps c'était pas ça. Et quand le temps n'est pas au beau fixe, ça joue sur mon moral. Bon ok sauf quand Mordred et moi on s'amuse à faire les cons sous la pluie mais c'est arrivé qu'une fois. Je pense pas qu'on va en prendre l'habitude sachant qu'on a faillit se choper une pneumonie tous les deux. On est vraiment con quand on s'y met mais c'était une bonne journée et les bonnes journées c'est rare que j'en ai ici. C'est rare que j'en ai depuis mon agression en fait. Dès que je me retrouve de nouveau seul dans ma chambre, c'est la déprime assurée. Il suffit que je regarde ma fenêtre et que je vois ces putains de barreaux pour me remettre dans un état de compression horrible. J'ai besoin d'air, j'ai besoin d'être dehors, si je pouvais je laisserai ma fenêtre ouverte tout le temps, quitte à dormir avec six couvertures. Rien que de savoir que je ne suis pas enfermé ça me fait du bien et ça m'aide à dormir. Et je préfère même pas penser que ma chambre est fermée à clé tous les soirs parce que ça c'est un truc qui me rend dingue. En même temps je sais que c'est pour mon bien, parce qu'il y a d'autres internés qui sont dangereux...

Bref, tout ça pour dire que dès que je peux passer du temps dehors je le fais. Je passe le plus clair de mon temps dans le patio, je kiffe ce petit patio en plus y'a jamais personne. Ce soir il est fermé, il est trop tard peut être allez savoir, je sais pas moi même. Alors je fais un petit détour et je me rends jusqu'au parc. Il se fait un peu tard, la nuit va tomber sous peu, mais j'ai pas envie de retourner déjà dans ma chambre. Ni d'aller dans la salle commune et voir plein de gens. Je veux voir personne, je veux parler à personne. Le parc à cette heure-ci, c'était tranquillité assurée.

Je plisse les yeux en m'avançant j'ai l'impression de voir une silhouette un peu plus loin. Fais chier, je voulais être tranquille. Je dévie ma trajectoire pour ne pas être trop proche de cette personne et puis je m'assois sur un banc. Je regarde cette jeune fille qui est en train de lire et j'ai l'impression de l'avoir déjà vu. Je réfléchis un instant et ça y est, elle a levé la tête légèrement et là je l'ai reconnu. Je ne la connais pas mais je l'ai vu plusieurs fois déjà. Elle ressemble tellement à ma Michelle... Elle doit travailler dans le coin c'est pas possible, je l'ai déjà vu plusieurs fois. Y'a personne, elle m'intrigue, je réfléchis pas plus longtemps et je m'approche jusqu'à elle. Elle a l'air concentré dans son livre.

« Tu travailles à la clinique ? »

Ni bonjour ni rien, ouais je suis comme ça. Je vais droit à l'essentiel. Nan en fait je m'en fou un peu d'être poli, de toute façon je suis interné donc tout le monde pense que je suis taré, autant en profiter et faire ce qu'on veut.

« Ca fait plusieurs fois que je te vois... »

C'est fou ce qu'elle ressemble à Michelle, surtout là dans l'obscurité je pourrais jurer que c'est elle. Mon coeur bat un peu plus vite malgré moi, je ne la quitte pas des yeux.

Le soleil descendait de plus en plus dans le ciel. Mais je lisais toujours. J’étais tellement concentrée que je ne voyais pas les rares personnes qui marchaient elles aussi dans le parc. Et plus le temps avançait, moins il y en avait. Ce n’était pas tous les patients qui avaient le droit de sortir de la clinique aux heures qu’ils voulaient. Certains devaient être impérativement accompagnés. Ils avaient probablement peur qu’ils se sauvent ou fassent du mal aux autres… Oui, c’était sûrement cela. Voilà pourquoi qu’à cette heure-ci, il n’y avait que moi. Du moins, c’était ce que je pensais. Alors que je tournais la page de mon livre, j’eus un violent sursaut. « Tu travailles à la clinique ? » m’avait-on dit. Le problème, c’était que je n’avais pas vu la personne s’avancer vers moi. Je mis tout de suite la main à ma bouche et ramassai mon livre qui venait de tomber sur le sol. « Oh mon dieu! Je suis désolée! Je ne t’avais pas vu arriver! » lui dis-je, désolée d’avoir réagi comme cela. Devant moi, il y avait un jeune homme tatoué qui semblait tout droit sorti d’un spectacle rock. Cependant, il ne s’agissait pas d’une vedette, mais bien d’un patient de l’hôpital… Je le savais parce que je l’avais déjà vu (même si c’était rapidement) dans l’établissement. Il m’avait d’ailleurs toujours semblé gentil, mais je ne m’étais jamais approchée de lui… Je ne savais pas pourquoi… Mais je sentais qu’il n’était tout simplement pas prêt à parler avec une parfaite inconnue… Certains patients n’étaient tout simplement pas réceptifs. « Et pour répondre à ta question… Non, je ne travaille pas ici… Mais ma sœur ainée, oui. » rajoutais-je avec un grand sourire.

Je n’étais pas offusquée qu’il ne m’est pas salué ni rien. Certaines personnes considéreraient cela impoli… Mais pourquoi juger? Je ne connaissais pas sa condition ni ses états d’âmes. « Ca fait plusieurs fois que je te vois... » ajouta-t-il alors. « Oui, je rend souvent visite à ma sœur… Et je viens souvent tenir compagnie aux gens d’ici. Je sais à quel point on peut se sentir seul… » lui dis-je. Je comprenais ce qu’ils vivaient. Certains patients ne recevaient jamais ou presque de visites. Cela pouvait être terriblement démoralisant. Je ne savais pas si c’était son cas à lui, mais j’étais assez heureuse qu’il me parle. J’aimais bien en apprendre plus sur les autres.

Cependant, le jeune homme commençait à me rendre mal à l’aise, bien malgré moi. Il me fixait dans les yeux. « Si tu veux, tu peux t’assoir… » lui proposais-je, histoire de connaitre le pourquoi du comment il me posait ces questions.

J'aurai dû faire plus de bruit en arrivant vers elle parce que je la fais sursauter assez pour qu'elle en fasse tomber son livre. Oops ? Je crois que je lui ai fait bien peur. Elle s'excuse disant qu'elle ne m'avait pas vu arriver. Pour couronner le tout, elle a presque la même voix que Michelle. C'est son sosie c'est pas possible. J'avais jamais vu quelqu'un qui lui ressemble à ce point là. Elles font peut-être partie de la même famille ? Oui c'était une piste à explorer. En parlant de famille elle me dit que c'est sa soeur qui bosse à l'hôpital et pas elle. Eh ben, elle squattait beaucoup le boulot de sa soeur. Je l'ai vu ici à de nombreuses reprises. Ca m'étonnerait qu'elle ait besoin de voir sa soeur aussi souvent ? Oh et puis pourquoi je pense à ça, c'est pas mon problème. Pourquoi je réfléchis trop ? Je devrais me contenter de pouvoir la voir de temps à autre. Elle m'explique qu'elle vient tenir compagnie aux gens à la clinique. Wow, elle a l'air d'avoir la main sur le coeur. Je connais pas beaucoup de gens qui prennent de leur temps libre pour venir voir des inconnus dans une clinique. Le fait qu'elle précise qu'elle connait ce sentiment d'être seul me fait comprendre qu'elle a déjà dû passer un long séjour à l'hôpital ou à la clinique par le passé. Je me demande bien pourquoi, mais je n'oserai jamais poser la question. Elle me dit que je peux m'asseoir et ouais je me rends compte que je dois avoir l'air con debout planté devant elle comme ça. Je n'ai pas envie de la mettre mal à l'aise à la regarder autant, alors je m'exécute, je m'assois à côté d'elle.

Je la regarde dans les yeux un instant, je sens mon coeur battre beaucoup trop vite pour mon propre bien. C'est très rare que je regarde les gens dans les yeux, les gens que je ne connais pas, mais elle, j'ai l'impression de la connaître.

« Tu ressembles tellement à quelqu'un que je connais... A mon ex... »

Je murmure tout bas la fin de ma phrase. C'est la première fois que je dis le mot « ex » pour la qualifier. Ca me fait toujours un mal de chien de l'admettre. Je comprendrais jamais pourquoi elle m'a trahi. Pourquoi elle m'a largué quand j'avais le plus besoin d'elle. C'est de sa faute si je suis ici, j'aurai jamais tenté de mettre fin à mes jours si elle était restée près de moi. Je détourne les yeux d'elle avant de prononcer la suite de ma phrase.

« Et elle me manque... Terriblement... »

Je murmure toujours. Ca me fait bizarre d'avouer ça. Surtout à elle qui lui ressemble tellement. A part à mon psy je n'ai fait cette confidence à personne. Je soupire doucement... dès que je parle de Michelle ça me déprime complètement. Je regarde l'herbe par terre. Non je vais pas me mettre à pleurer, j'en suis pas à ce point là... Mais si j'étais dans ma chambre là maintenant, ouais, je me serai laissé aller. Autant dire que je suis à fleure de peau à ce moment là. Je prends de grandes inspirations pour garder ma contenance et ça fonctionne. Heureusement.

Le jeune homme continuait de me fixer… Je ne savais pas quelle en était la raison, mais je sentais que je n’allais pas tarder à le savoir. Il allait s’en dire que j’étais terriblement intriguée par son attitude! Je lui demandai alors légèrement mal à l’aise s’il voulait s’assoir. Contrairement à ce que je pensais, il s’exécuta presque sur le champ. Je ne pus m’empêcher de sourire, effaçant sur le champ le ressenti que j’avais quelques minutes auparavant. L’inconnu avait simplement besoin de parler, j’imaginais. Il n’était probablement plus dangereux pour lui-même que pour moi. Sinon, il ne serait pas en ma présence, non? Dans les ténèbres, la situation me semblait terriblement étrange par contre. Je pris finalement la décision de ranger mon livre dans mon sac à main, parce que, de un, il faisait trop sombre, et de deux, j’étais en compagnie de quelqu’un. Ça aurait été grossier de penser que je pouvais encore glisser un œil dans mon livre et l’ignorer. Je n’étais tout simplement pas comme cela.

Pendant quelques instants, un silence s’installa. Je laissai aller, ne voulant pas le précipiter ou quelque chose du genre. Puis il finit par me révéler la raison pour laquelle il me fixait autant depuis tout à l’heure, ce qui me rendit de nouveau perplexe et encore plus mal à l’aise encore que je l’avais été quelques instants plus tôt.

« Tu ressembles tellement à quelqu'un que je connais... A mon ex... » me dit-il alors soudainement. Il s’agissait presque d’un murmure, comme s’il ne voulait pas que je l’entende au final. Les mots semblaient douloureux. Visiblement, il en souffrait encore. « Je suis désolée… » lui dis-je. Je ne voulais pas rappeler de mauvais souvenirs à quelqu’un… En plus lorsqu’il s’agissait de rupture amoureuse. Mais je ne faisais pas exprès. Je ne pouvais pas changer mon apparence… « Et elle me manque... Terriblement... » continua-t-il. Il murmurait toujours et semblait perdu dans ses pensées. Il me faisait de la peine. Je voyais une grande détresse en lui, mais je ne savais pas quoi faire pour l’apaiser.

« Je… Je ne sais pas quoi dire… » lui dis-je, de nouveau mal à l’aise. Après tout, qu’est-ce qu’il y avait à répondre à cela. Cependant, je voulais le rassurer. Je tentai donc de prendre sa main. Je ne savais pas s’il allait la prendre ou la repousser. Après tout, je ne le connaissais pas…

La nuit commence vraiment à se faire sentir, je la vois ranger son livre et ça me donne l'impression qu'elle a envie d'écouter ce que j'ai à dire. Je ne sais pas quelle heure il est mais je m'en fou. J'imagine juste que les infirmières de l'Aile Nord vont commencer à s'inquiéter sous peu de mon absence. Mais bon je suis jamais très loin et je suis toujours fourré dehors, ils auront vite fait de me trouver. Je ne sais même pas pourquoi je m'inquiète de ça, c'est sûrement un bon signe, je recommence à avoir plus d'émotions, je m'en fou un peu moins des autres. Peut-être, je sais pas. Ca fait 4 mois que je suis ici dans cette clinique et ouais, je peux dire que j'ai changé, que ça m'a aidé. Je n'en suis pas encore au stade où je peux retourner sous la lumière des projecteurs, loin de là. Je ne sais pas si j'en serai de nouveau capable un jour, et rien que de savoir ça, ça me tue.

Je lui avoue qu'elle ressemble à Michelle, elle s'excuse, elle est chou. Je ne vois pas pourquoi elle s'excuse mais je peux sentir que cette fille a le coeur sur la main. Rien que pour venir passer du temps avec les patients dans son temps libre, c'est qu'elle est généreuse. Je suis perdu dans mes pensées de mon ex, j'avoue en murmurant tout bas qu'elle me manque terriblement. La jeune fille me dit qu'elle ne sait pas quoi me répondre. Je prends une grande inspiration afin d'être de nouveau avec toute ma contenance. Je relève la tête et je me tourne vers elle pour mieux la voir.

« Ouais... Désolé... J'étale un peu trop ma vie. C'est pas mon genre en plus... »

Mais elle lui ressemble tellement. J'ai du mal à la quitter des yeux. Ca me fait du bien de la voir, il faut juste que je ne me laisse pas avoir et que je la prenne pour Michelle. Elle n'est pas Michelle, elle n'est que son sosie. Il paraît qu'on a tous sept sosies dans le monde, j'en ai trouvé un sur les sept de Michelle.

« C'est quoi ton nom ? »

Ma voix est douce, j'ai vraiment du mal à faire abstraction de tous ces sentiments que j'ai toujours pour mon ex. J'ai limite envie de la prendre dans mes bras, de la toucher, d'être en contact avec elle, mais non, je sais qu'il ne faut pas, je suis qu'un étranger pour elle. Ce n'est pas Michelle, il faut que je me le rentre dans la tête.

« Moi c'est Morgan. Morgan Montgomery. »

Je ne pense pas qu'elle connaisse mon groupe de musique, elle m'aurait reconnu avant, mais peut être qu'elle a déjà entendu mon nom quelque part. J'espère qu'elle ne pense pas que je suis un fou complet. Je suis pas ici parce que je suis dangereux pour la société, je suis dangereux juste pour moi.

« T'es vraiment... Très jolie. »

Ca faisait longtemps que je n'avais pas fait de compliments à une fille. Ca me fait bizarre de lui dire ça, mais ça m'est venu tout naturellement en même temps, comme si cette fille avait un pouvoir sur moi. J'aurai du rien dire maintenant que j'y pense. Je vais juste lui faire peur avec mes conneries. Heureusement qu'on est quand même dans l'obscurité, elle ne peut pas voir combien d'amour j'ai dans mes yeux. Mais il faut que je me raisonne, ce n'est pas elle que j'aime, c'est Michelle. Je le sais... Mais j'arrive pas à m'empêcher de me sentir tout bizarre à côté d'elle.

À force de venir à la clinique Waters, je m’étais habituée aux patients. Il y en avait de toutes les sortes. Des colériques, parce qu’ils n’acceptaient pas leur situation, ou qu’il n’y avait personne pour leur rendre visite. Il y avait les tristes, parce que rien n’allait selon leur plan et qu’ils pensaient passer l’éternité ici. Il y avait aussi les gens qui étaient heureux parce qu’ils allaient sortir bientôt. Et il y avait les nostalgiques, comme  le jeune homme qui était auprès de moi. Étrangement, c’étaient ceux qui avaient le plus de difficulté à s’en sortir. Peut-être parce qu’ils avaient toujours un pied dans le passé? Sûrement. Parce qu’ils ne pouvaient pas aller de l’avant. Ils ne progressaient pas. Le jeune homme à mes côtés m’en donnait la triste impression.

« Ouais... Désolé... J'étale un peu trop ma vie. C'est pas mon genre en plus... » me dit-il lorsque je lui avouai ne pas trop savoir quoi lui répondre. Je lui fis un pauvre sourire en guise de réponse. Ce n’était vraiment pas grave. J’aimais écouter les autres. Mais j’aimais aussi avoir le contrôle. Ne pas savoir quoi lui dire pour apaiser ses souffrances me rendait forcément triste à mon tour et je n’aimais pas ce sentiment. « C'est quoi ton nom ? » me demanda-t-il alors. « Je m’appelle Avery. Et toi? » lui demandais-je à mon tour. « Moi c'est Morgan. Morgan Montgomery. » me dit-il alors en guise de réponse. « Enchanté de faire ta connaissance Morgan. » lui dis-je, absolument sincère.

« T'es vraiment... Très jolie. » me dit-il finalement. Cette fois-ci, je n’eus pas d’autres choix que de fuir son regard, parce que j’étais dorénavant gênée. Une chance que les ténèbres avaient envahi les lieux parce que mes joues étaient désormais rosées. « Merci.. » commençais-je par lui dire. « Je ne veux pas t’offenser ou quoi que ce soit, mais que s’est-il passé avec elle? » ajoutais-je en éclaircissant la voix, essayant de parer à mon malaise.

Je ne voulais pas le blesser par ma question. J’étais simplement beaucoup trop curieuse de nature. Mais aussitôt ma question prononcée, je regrettai mes paroles. Et si ça le rendait encore plus nostalgique que maintenant? Quoique je ne pouvais pas faire pire que de ressembler à son ex, non?

Elle s'appelle Avery, rien à voir avec Michelle. Heureusement d'ailleurs. Je ne sais pas dans quel état je serai devenu s'il s'avèrait qu'elle s'appelait Michelle ou un quelconque autre prénom avec une consonance assez proche. Avery est polie et a l'air sincère quand elle me dit qu'elle est enchantée de faire ma connaissance. Je ne sais pas ce qui me prends, mais je lui dis que je la trouve jolie. Des mots que je n'ai pas prononcés ensemble dans une même phrase depuis des lustres. Je la regarde en même temps et je ne manque pas de voir qu'elle fuit mon regard. Je dois la mettre mal à l'aise. Elle doit me prendre pour un de ces pervers qui sont internés dans l'aile Nord avec moi. Je devrais peut être lui dire que je n'ai pas l'intention de lui faire de mal... Je sais pas. Non ça ne va lui faire que plus peur. Pourquoi préciser ça si je n'allais rien lui faire ? Ça ne ferait qu'éveiller des soupçons infondés. Je préfère me la fermer sur le coup. Je soupire un peu et détourne les yeux d'elle aussi après un instant. Je n'ai pas envie de la mettre encore plus mal à l'aise.

Je l'entends s'éclaircir la gorge avant de me demander ce qui s'est passé avec mon ex. Elle prend des gants pour me demander ça, elle ne veut sûrement pas me mettre en colère. Elle a l'être de savoir que nous - internés - on est imprévisible. Elle n'a pas tort, il vaut mieux qu'elle fasse attention. Je sais que quand j'ai des crises je peux vraiment faire peur aux gens par mon état, mais je ne suis pas dans une situation propice à une crise.

« Version courte... Elle m'a largué quand j'avais le plus besoin d'elle. Et j'ai compris qu'elle ne m'aimait pas vraiment, elle était avec moi que pour ma célébrité. »

Je me rends compte qu'elle n'est peut être pas au courant que je suis connu parce que je ne le suis pas ici en Australie.

« Et moi j'étais et je suis toujours fou d'elle... »

Je soupire après avoir fait cette confession. Je baisse les yeux vers l'herbe avant de continuer ma phrase.

« J'attends comme un con qu'elle me contacte. Je sais pas pourquoi j'ai l'espoir toujours alors que ça fait sept mois qu'elle a fait silence radio... »

Je me passe une main sur mon poignet que j'ai lacéré il y a plusieurs mois afin de mettre fin à mes jours. Je me rends bien compte de combien je suis pathétique à toujours espérer quelque chose de la part de Michelle, mais je n'arrive pas à faire autrement. J'ajoute rien de plus, je pense que Avery a toutes les infos, ou presque, pour comprendre la situation.