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 Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional.

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Lucas J. Russel
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MessageSujet: Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional.   Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional. EmptyMer 17 Juil - 21:15


    La journée normale d'un aide soignant comme Lucas consiste à effectuer toutes les petites tâches que le reste du personnel n'a pas le temps de faire. Servir les petit déjeuners pour certains, aider aux gestes du quotidien quelconques, échanger brièvement – ou longuement – avec les patients, préparer les médicaments, refaire les lits... Rien de tout cela ne déplaisait à Lucas, si ce n'est le fait de se sentir parfois totalement inutile, ne pas pouvoir aider les patients comme il l'aurait souhaité, et parmi « les patients », il entendait non seulement sa sœur, mais également tous ceux qui résidaient – ou passaient occasionnellement – dans l'aile nord de la clinique : celle réservée à la psychiatrie. Il essayait bien, dans ses échanges avec les patients, de les comprendre, les analyser à sa façon. Mais il craignait d'une part le regard moqueur des médecins – et plus particulièrement des psychiatres – et il sentait d'autre part qu'il était bien loin de comprendre ce qui pouvait se passer dans leur tête, de même que leur pathologie, malgré tout ce qu'il avait pu lire dans les nombreux ouvrages empruntés à la bibliothèque.

    En cette chaude journée, il avait eu le temps de rendre visite à sa sœur et de discuter longuement avec elle. Mia. La prunelle de ses yeux. Seulement, leurs discussions n'étaient pas vraiment faites d'échanges. Il s'agissait plutôt de Lucas parlant seul ; de jolis monologues qui semblaient divertir la jeune muette. Il réalisait bien qu'elle n'était pas dans une grande forme en ce moment. Elle fonctionnait par périodes, elle semblait parfois presque normale : on aurait pu se demander ce qu'elle faisait dans cette clinique. Et d'autres fois, personne ne pouvait l'approcher sans qu'elle ne se mette à crier et à se débattre, les insultes sortant de sa bouche comme des balles (qui venaient atterrir directement dans son cœur quand il s'agissait de Lucas).

    C'est donc avec une certaine amertume, une forme de dépit, qu'il vérifiait chaque chambre ce soir-là, distribuant tantôt les médicaments, ou tantôt lançant un bonne nuit bienveillant. A vrai dire, sa routine était quelque peu modifiée aujourd'hui : les chambres par lesquelles il passait n'étaient pas celles qui lui étaient habituellement attribuées. Il prit donc bien soin de lire le nom de chaque patient avant de frapper à la porte de leur chambre. Son sourire et son regard étaient avenants ; il ne laissait rien paraître de sa tristesse journalière et tentait de sembler le meilleur aide soignant possible. Il arriva à la chambre d'une jeune femme nommée Elsa Roseburry. Ce prénom était joli. Il lui rappelait un peu celui de sa mère. Elle souffrait apparemment de troubles multiples notamment liés à son passé. Lucas n'aimait pas en savoir trop sur les patients avant de les avoir rencontrés. Il aimait que ce soit eux qui se révèlent à lui, s'ils en avaient envie.

    Il frappa à la porte de trois coups légers mais vifs. Quelques secondes. Pas de réponse. Lucas insista, frappa de nouveau. Toujours pas de réponse. « Mademoiselle Roseburry, c'est Lucas. Tout va bien ? » Le silence. Il reprit, prévenant la patiente de sa venue dans la chambre « Mademoiselle Roseburry, je vais entrer pour vérifier que tout va bien. » Il poussa la porte de la chambre et fit un premier pas : le lit était vide. Son regard se posa à plusieurs endroits de la pièce avant d'apercevoir la porte de la salle de bain entrouverte ; une raie de lumière en sortait. Il se dirigea lentement vers la salle de bain, assez apeuré de ce qu'il allait y trouver. Une fois la porte poussée, il trouva face à lui une jolie brune, dont on pouvait lire le mal-être sur le visage. Il remarqua immédiatement qu'elle se tenait le poignet : celui-ci laissait échapper du sang, quelques gouttes perlaient et venaient s'écraser sur le sol. Il fit deux pas rapides pour la rejoindre mais ne la toucha pas, sachant ce qu'un simple geste peut créer chez certains patients. Il lui dit alors : « Vous vous êtes blessée visiblement. Ca n'a pas l'air très profond. Que dites-vous de soigner cette petite plaie ? » Il lui lança un regard à la fois interrogateur et bienveillant et attendit sa réponse. Il fuyait néanmoins son regard, qu'il trouvait bien trop fragile pour être affronté – quel paradoxe.
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MessageSujet: Re: Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional.   Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional. EmptyJeu 18 Juil - 18:34

Elsa se trouve dans sa chambre de la clinique Waters. Elle est en tenue de nuit et s’apprête à aller au lit. Pyjama très simple. T-shirt et short. Mais elle ne se sent pas très bien d’un seul coup. Elle a la nausée et le tournis. Elle a chaud tout d’un coup. C’est dans ces moments de faiblesse qu’il apparait. Il est là, dans un coin de sa chambre, moqueur. Il s’amuse à ses dépends. Il lui dit qu’elle est totalement ridicule. La jolie brune n’a pas la force de le repousser de son esprit. Il reste donc là à la regarder, sourire aux lèvres. Il lui fait peur, alors elle se lève et va à la salle de bain. Si elle ne peut pas le chasser, elle va le fuir. Elle ne sait faire que cela.

Elsa se retrouve face au miroir. Elle se met de l’eau sur le visage pour essayer de se calmer, mais en relevant la tête, il est là, derrière elle. Elle a un violent sursaut, puis reste un moment figé. « Va-t-en! » cri-t-elle après un court moment. Ça suffit! Elle en a assez! Elle en a marre de toujours le voir là! La jolie brune ne sait pas ce qu’il lui prend, mais elle donne un coup de poing dans le miroir. Tout ce qu’elle souhaite, c’est qu’il s’en aille. Elle réussit, mais les conséquences de son geste vont lui pourrir l’existence. Un mince filet de sang coule de ma main et de son poignet. Ce n’est pas bien grave comme coupure, mais que vont-ils en penser ici? Vont-ils croire qu’elle a encore essayé d’attenter à ses jours? Elle ne le veut pas. Elle essaie d’arrêter le sang de couler, mais n’y parvient pas.

On cogne soudainement à la porte. Trois coups légers.

Elsa se fige. Elle ne répond pas, ne bouge pas. Que faire? On cogne à nouveau. Si elle ne répond pas, la personne derrière la porte va s’alarmer. Mais elle s’obstine à garder le silence. C’est plus fort qu’elle. « Mademoiselle Roseburry, c'est Lucas. Tout va bien ? » qu’on lui demande. Elsa ne dit rien. Elle reconnait la voix par contre. C’est un homme, mais elle n’en a pas autant peur que les autres. Elle ne sait pas pourquoi. Elle le connait uniquement de loin. « Mademoiselle Roseburry, je vais entrer pour vérifier que tout va bien. » l’avertit-il. Elle entend la porte s’ouvrir. Elsa sait qu’il est entré. Elle sent la panique monter en elle. Que va-t-il dire?

Il s’approche dangereusement de la salle de bain. Elle peut l’entendre. Puis, il pousse la porte. Il la regarde, mais son attention se porte immédiatement sur le poignet de la jolie brune. Sans s’en rendre compte, elle le tient toujours. Lucas s’approche d’elle. Il a l’air soucieux. Elsa a un mouvement de recul malgré elle.

« Vous vous êtes blessée visiblement. Ca n'a pas l'air très profond. Que dites-vous de soigner cette petite plaie ? » dit-il. Il ne regarde pas Elsa dans les yeux, mais il regarde tout de même dans sa direction. « Ce n’est pas ce que vous pensez… » laisse échapper Elsa. Elle a peur qu’il aille tout raconter. Elle ne veut pas qu’il le dise. Croit-il qu’elle a tenté de mettre fin à ses jours? « C’est un accident.. » rajoute-t-elle, les yeux suppliants.  

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MessageSujet: Re: Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional.   Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional. EmptyVen 19 Juil - 14:48



    Ses cheveux étaient d'un noir de jais et ils entouraient un visage pâle. Mais ce n'était pas sa pâleur qui frappait le plus Lucas. Non, c'était ses yeux. Elle ouvrait de grands yeux apeurés ; on y lisait la crainte, l'effroi même. Un instant, l'aide soignant se sentit désemparé face à un tel visage. Dans la clinique, beaucoup connaissaient la peur, beaucoup l'exprimaient à leur façon ; sa sœur elle l'exprimait tantôt par des cris, tantôt par un mutisme déconcertant. Puis il y avait ce patient, un vieil homme à qui il ne restait plus beaucoup de temps, pensait Lucas. Il avait alzheimer – et la maladie était déjà à un stade assez avancé. Il passait ses journées assis face à une table à marmonner quelques phrases incompréhensibles, et dans ses rares moments de ce qui s'approchait d'une forme de lucidité, il appelait Lucas – les deux hommes étaient assez proches – et ses yeux se remplissaient de larmes. Le nom de sa femme s'échappait doucement de ses lèvres sèches, et il replongeait dans sa folie. Sa peur était sans doute la solitude.

    Mais la peur de cette patiente, Elsa Roseburry, semblait tout autre à Lucas. Il lisait dans ses yeux une peur profonde, omniprésente ; il s'en sentait en partie responsable : était-elle toujours comme cela ou était-ce dû à la présence de l'aide soignant ? Il hésita quelques secondes à lui poser cette question. Est-ce que je vous effraie ? Il ne le fit pas et se contenta de l'observer calmement, tenta de composer sur son visage un air doux tandis que ses traits durs essayaient naturellement de s'imposer. Il sortit en prévision de son uniforme une petite compresse stérile – ses poches étaient toujours remplies de matériel quelconque : bandages parfois, une paire de ciseaux, des pansements... Aujourd'hui, par chance, il avait des compresses. Il se souvenait les avoir mises dans sa poche après s'être lui-même coupé en brisant maladroitement un verre.

    La jeune femme, toujours apeurée, ne bougeait pas d'un poil tandis que Lucas faisait un pas vers elle. Puis une voix, douce mais tremblante, se fit entendre. « Ce n’est pas ce que vous pensez… » . Il ne répondit pas immédiatement parce qu'il n'était pas sûr de comprendre : qu'était-il censé penser ? Il ne pensait rien, si ce n'est qu'une patiente fébrile et blessée se tenait à ce moment précis face à lui, et qu'elle lui semblait totalement perdue et paniquée. « C’est un accident.. » , poursuivit-elle. Pourquoi se justifiait-elle ? Pensait-elle que Lucas la voyait comme une maniaco-dépressive qui avait tenté d'atteindre à ses jours ? Ce n'était pas le cas. L'aide-soignant essayait toujours de voir le meilleur chez les patients ; s'il n'était pas d'un naturel optimiste dans la vie, il l'était quant à ses patients.

    Ses yeux se plantèrent cette fois dans ceux de celle qui lui paraissait un animal blessé. Il leva la main qui tenait la compresse qu'il avait sortie quelques secondes auparavant. « Je ne crois rien, si ce n'est que vous avez besoin de nettoyer cette vilaine plaie. » Il s'avança encore plus près de la jeune femme et ajouta d'une voix douce : « Peut-être que vous et moi sommes aussi maladroits l'un que l'autre ». Il lui montra la petite plaie cachée par un pansement qu'il s'était faite dans la journée. Il la recouvra puis avança sa main vers le poignet meurtri de la brune. Doucement, il se saisit de ce maigre poignet du bout des doigts et murmura : « Alors, que dites-vous de soigner tout cela? »
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MessageSujet: Re: Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional.   Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional. EmptyVen 26 Juil - 0:09

Elsa a peur. Cela se lit tout aussi bien dans ses gestes que sur les traits de son visage. Elle craint qu’il la dénonce et qu’elle perde tous ses droits. Elle ne veut pas être constamment surveillée. Elle veut un semblant de liberté. Ironique, n’est-ce-pas? Compte tenu du fait qu’elle est présente à la clinique Waters de son plein gré… Personne n’est au courant de son raisonnement. Mais dans sa tête, c’est clair comme de l’eau de roche; elle ne se sent pas en sécurité nulle part ailleurs. Cependant, elle sait très bien qu’elle ne pourra pas rester indéfiniment en ces murs. Mais elle a trop peur pour s’en sortir. Qu’est-ce qui l’attend à la sortie? Ses parents adoptifs? Ceux qui pleurent la mort de son frère… Non, elle ne veut pas les affronter. Et puis, il faut qu’elle se débarrasse de lui et de sa peur des hommes. Ça lui nuit… Ça la tue.


Lucas a fait un pas dans sa direction. Il a sorti des compresses de sa poche. Elle n’a pas fait attention, mais il la regarde maintenant directement dans les yeux. Elle en a un frisson malgré elle, mais elle tente cette fois-ci de se contrôler. C’est Lucas qui est en face d’elle, pas quelqu’un qu’elle ne connait pas. La jolie brune essaie de contrôler sa respiration pour ne pas s’affoler. « Je ne crois rien, si ce n'est que vous avez besoin de nettoyer cette vilaine plaie. » dit-il à Elsa. Elle sent la pression descendre quelque peu. Elle se détend presque et le laisse s’approcher. Elle sait qu’il ne lui veut que du bien. Mais c’est si difficile pour elle de donner sa confiance à quelqu’un. Au moins, elle tend à faire des efforts.



« Peut-être que vous et moi sommes aussi maladroits l'un que l'autre » dit-il à la jeune femme en lui montrant une de ses propres blessures. Elsa ne peut s’empêcher de sourire. Il approche sa main du poignet de la jeune femme, mais à la place de le reculer, elle l’avance vers lui. Lucas a sans aucun doute la meilleure des techniques pour approcher la jolie brune, puisqu’elle ne réagit pas lorsqu’il touche finalement à son poignet. « Alors, que dites-vous de soigner tout cela? » demande-t-il finalement.

« J’aimerais bien oui… Merci… » lui souffle-t-elle. Elsa ne comprend pas pourquoi elle se laisse faire. Mais il a réussit à la mettre en confiance. Elle ne sait pas pourquoi non plus, mais elle sait qu’il dégage quelque chose de bon. Il n’est pas mauvais, loin de là.

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MessageSujet: Re: Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional.   Elsa. Pain is inevitable. Suffering is optional. EmptyLun 28 Oct - 18:13


    L'étonnement prit place sur le visage de l'aide-soignant, qui cherchait pourtant à afficher un air rassurant, presque protecteur, quand la faible voix de la jeune patiente se fit entendre. « J'aimerais bien oui... Merci... ». Il tente de masquer sa surprise et un léger sourire se dessine sur ses lèvres. Finalement, c'est un soulagement, mais aussi un cadeau, de se voir accorder une forme de confiance de la part d'une patiente si fragile – qu'il ne connaît pas très bien qui plus est. Jolie récompense pour quelqu'un dont l'estime de lui-même oscille entre néant et vide intersidéral – vous l'aurez compris, inexistante. Quiconque penserait que ce n'est rien, se laisser soigner une petite plaie, mais Lucas savait que pour une personne comme Elsa Roseburry, c'était comme franchir une montagne, l'équivalent pour quelqu'un de normalement constitué du fait de s'abandonner complètement à autrui. Lui laisser prendre le contrôle sur soi. Même s'il ne savait pas ce qui était arrivé à cette jeune femme, il lisait sur son visage une souffrance profonde ; une expression qui ne trompe pas, un regard fuyant. Tout un tas de signaux ajoutés qui font que l'on sait quand quelqu'un est plongé dans une forme de souffrance sur laquelle on ne peut pas mettre de mots.

    Ainsi, la surprise passée et le soulagement s'étant finalement imposé dans l'esprit de l'aide-soignant, il approcha sereinement la compresse vers la plaie de la brune – quelques gouttes de sang tombaient sur le sol, et un mince filet salissait la peau de la patiente apeurée. Doucement, il la pressa contre la dite plaie tout en gardant le poignet qu'il avait saisi auparavant dans son autre main. Il le serrait doucement, espérant ainsi instaurer un climat de confiance entre lui et elle. Il sentait sa maigreur et avait peur qu'elle se brise, quelle que soit la pression qu'il exerçait sur elle. La compresse s'imbiba de sang et Lucas la retira avant d'appliquer un peu de désinfectant. « Ca ne pique pas, hein ? ». Un sourire apparut derechef sur son visage aux traits durs. « Bon, un petit bandage, et on oublie cette histoire ?  ». Le silence pesant de quelques secondes rappela à l'aide-soignant qu'il avait pour obligation de signaler ce genre d'accidents à la direction. « Vous savez, je suis censé prévenir quand un événement de la sorte se produit... » Il marmonna quelques secondes ; il avait remarqué quelques instants plus tôt qu'elle ne souhaitait pas que tout cela soit compris de travers. Non, elle n'avait pas tenté de mettre fin à sa vie. Puis il reprit, non sans une certaine hésitation. « Si vous le souhaitez je peux... Omettre de le faire.. ? ». Lucas avait conscience du risque qu'il prenait en proposant cela. Mais il était arrivé à un moment de sa vie où il se trouvait fatigué de ce qu'il voyait comme un manque de courage, d'actes en tant que réalisation concrète de ses convictions. Ca, c'était un début. Un petit pas vers une conscience plus tranquille.
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